Sus à l’éco-anxiété!

Il ne se passe une journée sans que les médias reviennent sur la question climatique. Des «éco-angoissés» de tout poil bloquent routes et autoroutes ou s’en prennent symboliquement à des œuvres d’art. La COP 27 vient de se terminer avec son lot de discours entendus. Les programmes scolaires sont revus sous l’angle de la décroissance. Qu’en est-il réellement? Le dernier ouvrage d’Olivier Postel-Vinay, "Sapiens et le climat – Une histoire bien chahutée", fait le point sur les interactions entre l’histoire des hommes et le climat.
Mais non, ça va aller mademoiselle. Dr
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Nouvellement entré dans nos dictionnaires, le terme «éco-anxiété» est un mot omniprésent tant dans les médias que sur les réseaux sociaux. D’habitude, peu m’en chaut et je passe mon chemin en secouant la poussière de mes sandales. Jusqu’au jour où… L’an dernier à la fin des cours, un groupe d’élèves s’approche de mon bureau. Ils m’expriment leur lassitude à force d’ingurgiter des cours traitant d’écologie tout en les culpabilisant. Je leur demande d’être plus précis. On m’explique alors qu’outre le cours de géographie, les cours de langues (anglais et allemand) comprennent des modules leur distillant la bonne parole écologiste et que toute remise en question est bannie. Bien plus encore, le cours de musique sert de vecteur à l’idéologie écolo-gauchiste. Ce jour-là, derrière mon bureau, je n’ai su que leur répondre. En écrivant ces lignes je pense à eux…

D’habitude, les livres «scientifiques» m’ennuient et je dois me faire violence pour les lire. Ce ne fut pas le cas avec l’ouvrage d’Olivier Postel-Vinay. L’auteur, qui fut longtemps rédacteur en chef de la revue scientifique La Recherche, possède un indéniable sens de la vulgarisation sans jamais tomber dans la simplification outrancière. Avec ce livre, nous sommes conviés à une odyssée, celle de l’espèce humaine, qui nous fait parcourir notre globe sur près de 30’000 ans.

Une réalité indubitable

D’aucuns doivent se dire que l’auteur de Sapiens et le climat doit être un climatosceptique de plus issu de la nébuleuse conspirationniste. Que nenni, Olivier Postel-Vinay considère que le réchauffement climatique est une réalité indubitable. Cependant, il rejette les exagérations qui semblent bien souvent empreintes d’idéologie et de préconcepts discutables, et ce même chez certains scientifiques ou ONG. En fait, selon l’auteur, nous vivons un optimum climatique comme le monde en a déjà connu notamment aux temps des premiers empereurs romains et des croisades.

Ce livre prend en compte la recherche scientifique – notamment la paléoclimatologie – des vingt dernières années, qui a modifié en profondeur la vision que nous avons de l’histoire de l’humanité: l’époque néolithique et son réchauffement climatique (plus important qu’aujourd’hui) qui a permis de nombreuses innovations, la chute de l’empire romain et le rôle central qu’y joue le climat, la fin des Incas et des Mayas, la Révolution française.

Les Philippulus de la décroissance et autres zélotes, qui brandissent comme un étendard le graphique en forme de «crosse de hockey» en nous prédisant la fin du monde, devraient sortir de leur conformisme idéologique et oser lire le livre d’Olivier Postel-Vinay. Pourquoi? Tout d’abord, il pourrait corriger leur bannière. Ce fameux graphique où l’on voit une ligne presque plate durant 2500 ans et qui monte en une diagonale infernale au début des Trente Glorieuses n’est pas crédible. Qu’en est-il des périodes chaudes comparables à la nôtre: entre 100 avant et 200 après Jésus-Christ, entre 1000 et 1300, entre 1920 et 1940? «La canne de hockey» devrait plutôt ressembler à un serpent ondulant.

La conclusion d’Olivier Postel-Vinay relève que, dans le cadre de notre optimum climatique, il faut souligner que trois éléments sont nouveaux: «Le premier est que les pays riches ont acquis les moyens de lisser les microcrises climatiques qui les affectent […]. Le second est qu’en raison de la conjonction entre les progrès de l’industrie et la croissance vertigineuse de la population mondiale, la concentration dans l’atmosphère des gaz à effet de serre que nous y injectons a atteint un niveau supérieur à tout ce que Sapiens a pu connaître depuis son arrivée sur terre. Ce qui conduit au troisième élément nouveau: nous vivons une crise climatique réellement sans précédent, en ce qu’elle se fonde non pas sur des bouleversements concrets entraînés par un changement climatique catastrophique, mais sur l’inquiétude générée par des scénarios élaborés par des spécialistes sur une crise à venir. Pour la première fois Sapiens vit une crise climatique par anticipation.»

L’ouvrage d’Olivier Postel-Vinay est autant purgatif que roboratif. Il nous permet d’éliminer l’éco-anxiété de notre intelligence tout en fortifiant notre entendement. En effet, il nous montre que, si les changements climatiques ont parfois été la cause de l’effondrement de certaines sociétés, ils ont aussi été le moteur des plus grandes innovations.

Olivier Postel-Vinay, Sapiens et le climat – Une histoire bien chahutée, Paris, Presses de la Cité, 2022.

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