Les hommes des cavernes, ces chauds lapins

Ou comment la lecture de Philippe Muray nous aide à refuser l’ordre de nous «éclater» comme au paléolithique.
On parle trop peu des pratiques sexuelles des hommes des cavernes. Heureusement, la RTS est là. Alexander Krivitskiy / UNSPLASH
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«L’époque qui commence représente la plus grande attaque contre le fond culturel juif de l’Occident, c’est-à-dire contre les suites de l’exil du Jardin d’Eden.» Ainsi s’exprimait l’écrivain Philippe Muray, en 2000, refusant l’invasion des professions inutiles mais cools, des Prides et des trottinettes sur nos trottoirs. Deux décennies plus tard, les trottinettes sont devenues électriques et la marche forcée vers l’infantilisation générale s’accélère à tel point que l’on se demande souvent ce qu’aurait écrit le père de Festivus Festivus s’il était encore parmi nous. Qu’aurait-il pensé, par exemple, de la réflexion proposée par la RTS, vendredi 27 mai vers 21 h 00, au sujet de la sexualité dans les abris rocheux? «Est-ce que les hommes de Cro-Magnon pratiquaient la levrette?», en voilà une question passionnante!
Prenons le pari de répondre pour Muray. Sans doute aurait-il jugé que l’humanité se donne vraiment bien du mal pour réintégrer le Jardin enchanté dont elle n’aurait jamais dû être expulsée. Pensez donc! En des temps où le judéo-christianisme ne sévissait pas encore, notre espèce était festive et portée sur la chose. Vite, faisons comme nos ancêtres et finissons-en une bonne fois pour toutes avec cette idée lamentable de culpabilité!

Festivocrature

Au fond, l’on pourrait se contenter d’ironiser si nous n’avions pas conscience, grâce à la lecture des Exorcismes spirituels de Muray, de ce qui se joue devant nous. Ainsi, «la fouille hallucinée des archives» n’a-t-elle plus uniquement pour vocation de «donner du travail aux SDF de l’indignation». Dans la «permutation néo-carnavalesque» des valeurs à laquelle participe cette exploration du passé, il s’agit désormais de ramener les morts dans la morale de notre temps et d’étendre un peu plus l’obligation de ne garder que la sexualité comme horizon. «Qui songerait», disait l’auteur, «à se révolter contre une oppression qui ne communique, au fond, que l’ordre de s’amuser?»

Souvent réduite à sa critique de la «festivocrature», la pensée de Muray n’est pas seulement indispensable pour comprendre les rouages de la pensée unique actuelle. Elle nous permet aussi, en prolongeant les analyses de La Société du Spectacle de Guy Debord, de ne plus être acteurs d’un effondrement sans précédent de la pensée critique.

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